Yves propose une lecture du travail d'Alain Plouvier, notamment son rapport au temps quasi-méditatif. Ces tableaux sont une invitation à la contemplation du monde, une suspension de notre frénésie occidentale.

Peu de gens le savent, mais des extraterrestres bienveillants vivent parmi nous. Ils peuvent même porter des noms bien français, tel que : Alain Plouvier.
Et vivre dans une maison à la fois somptueuse et discrète, où l'on peut même être invité si l'on sait.
Mais si l'on sait quoi ?

Par exemple, ce que veut dire « une maison somptueuse ». Il ne s'agit pas d'une maison avec deux piscines et garage pour dix voitures, des écrans plats et des connexions partout. Ce qui pourrait ressembler à des écrans : des tableaux, des photos, des vitrines, des boîtes où une forme de temps s'arrête, le temps médiatique; où une autre forme de temps commence, le temps humain. Un temps où ce qui apparaît n'est pas généré par des systèmes machiniques d'où la moindre trace spirituelle est expurgée entre chaque zéro et chaque un ; mais où images et objets sont façonnés par des personnes réelles, dans un monde où la matière danse avec l'esprit, dans un temps vécu.
Quant aux connexions, il y en a, mais si l'on rêve d'être un papillon.

Un jour, j'ai rêvé que j'étais un papillon, et à présent je ne sais plus si je suis Tchouang-Tseu qui a rêvé qu'il était un papillon, ou bien si je suis un papillon qui rêve que je suis Tchouang-Tseu.
Dans la maison d'Alain Plouvier, on échappe miraculeusement à l'emprise de la toile d'araignée mondiale : ici des connexions d'une autre planète abondent.

Avec ces papillons éternisés dans leur boîte ; ou ces insectes réincarnés en bijoux ; connexions avec les œuvres de ses amis artistes, peintres, sculpteurs, photographes, musiciens avec lesquels il échange et partage, dans la vraie vie, de vraies ouvres, qui font de sa maison un petit musée dont la visite provoque l'émerveillement, l'envie de dire merci.

On peut trouver sur Internet ou ailleurs des reproductions de ce que fait Alain Plouvier. On peut être séduit. Et pourtant on n'aura rien vu.
On n'aura pas vu les siècles qui habitent une pierre au centre d'un tableau, pierre précieuse pour avoir été choisie au hasard d'une rencontre.
On n'aura pas vu la milliseconde qui fait surgir une forme et une couleur, indescriptibles, qui ne se livrent qu'à la personne présente en chair et en os, avec une âme dedans si possible.
On n'aura pas vu les heures, les jours et les années qui demeurent au fond de chaque œuvre, pièces détachées d'une vie humaine qui a eu un début, aura une fin.

Le temps long et le temps court se rencontrent, se tressent d'une matière à l'autre, d'un geste à l'autre, dans chaque tableau d'Alain Plouvier. On peut en choisir un, le regarder cinq minutes, une heure, ou toute une vie chez soi. Si on a su comprendre sans chercher à comprendre les signes intraduisibles qu'il contient, il continue d'exister en nous, qu'on reste en sa présence ou non, comme un secret intime, à la fois solide et insaisissable, proche et lointain. Comme une météorite presque géométrique qu'un hasard heureux et méticuleux, plus l'action d'un artiste élu, aurait façonnée, polie, et déposée là.