Françoise perpétue la tradition du carnet de voyage, où elle note ses impressions graphiques et intimes du monde extérieur. Ses œuvres sont un passage entre le dedans et le dehors, un jeu de reflets, d’échos et de résonances.

Rencontres et voyages

Après l'importance prépondérante que Le Petit Pays eut dans les premières étapes de cette évolution artistique, on peut dégager un nouveau thème, L'Ailleurs : pulsion de la jeunesse vers une altérité radicale, au gré des rencontres et des voyages.

Provence, Italie, Espagne ; plus tard Chine et Japon : chaque découverte d'une nouvelle lumière, de nouveaux paysages, de nouvelles manières d'être et de vivre déclenche chez l'artiste une surabondance du désir d'exprimer les émotions sensuelles ressenties au cours de ces pérégrinations.

Toutes les techniques picturales sont alors mises en œuvre: dessins et aquarelles rapides des carnets, collages d'éléments collectés dans la réalité matérielle de ces nouveaux milieux, peinture bien sûr, entrent en jeu pour créer un écho de ce qui a été éprouvé. 

Carnets

Le voyageur romantique traversant les Alpes terrifiantes et l'Italie heureuse ne se séparait pas de son carnet de voyage, s'efforçant de saisir et de fixer en quelques coups de crayon, quelques touches de couleurs, quelques mots, les paysages et les scènes qui le touchaient.

Sans doute la pulsion initiale de Françoise Bertsch revenant en marge de son travail à ses chers carnets est-elle un écho de cette tradition. Mais ici, chaque note graphique a tôt fait de prendre un tour bien spécifique.

Carnet d'Espagne, 2015

Au départ, il y a toujours le désir de capter une émotion, un sentiment déclenchés par quelque vision du monde extérieur : nuances de la mer, ligne d'un groupe d'arbres, masse du rocher, éclat de lumière.

Mais la couleur posée, le rythme suggéré, se mettent vite à jouer leur petite musique faite de contrastes et d'harmoniques, d'échos et de résonances, d'apaisements et de déchaînements. La modeste impulsion initiale a réveillé la masse immense d'impressions picturales engrangée dans l'inconscient de l'artiste.

Quelques fragments du quotidien introduisent souvent leur note discrète : bouts d'affiche, ticket, page de prospectus, traces d'écriture. Ces reflets de la vie qui va viennent là en amplification ou en contrepoint de ce que disent le crayon ou le pinceau.

Et les pages succèdent aux pages comme les jours succèdent aux jours.

Mais alors que ceux-ci s'enfuient dans la brume du passé, le carnet de note continue à raconter ce qu'ils ont eu d'unique pour la sensibilité de l'artiste : instruments du temps retrouvé.